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Œdème maculaire / sclérodermie systémique : le point sur 2 projets de recherche

04/11/2021

Le premier projet mené au sein du Laboratoire de Biochimie Physiopathologique et Nutritionnelle (LBNP) et financé par la Fondation Brugmann se concentre sur la compréhension des mécanismes inflammatoires impliqués dans le développement des œdèmes maculaires (OM) rétiniens.

L’OM est une complication fréquente en ophtalmologie que l’on retrouve dans de nombreuses pathologies vasculaires, inflammatoires et dégénératives oculaires. De par sa fréquence dans la population générale, nous nous sommes penchés depuis plusieurs années sur les mécanismes inflammatoires impliqués dans le développement des OM diabétiques.
L’OMS estime à 465 millions le nombre de personnes atteintes du diabète dans le monde et projette que ce chiffre pourrait atteindre les 700 millions en 2045. Les complications oculaires du diabète sont fréquentes puisque 35% des diabétiques finissent par développer une rétinopathie diabétique (RD) et 12% un OM. Cette dernière complication représente l’une des premières causes de cécité dans les pays occidentaux.
Dans la maculopathie diabétique, la rupture de la barrière hémato-rétienne entraine une accumulation de solutés et de liquide au sein de la rétine. L’hypothèse du LBPN est que, lors de ce phénomène, l’épithélium pigmentaire rétinien (EPR) est soumis à un stress hyperosmolaire (HOS) activant diverses voies inflammatoires.
L’essor de la recherche fondamentale a permis d’identifier un facteur de croissance nommé le VEGF comme la principale cause de l’OM diabétique et de développer des traitements ciblant spécifiquement cette protéine. Aujourd’hui, le traitement anti-VEGF fait consensus à travers le monde et est la pierre angulaire de la prise en charge des OM diabétiques. Toutefois, on estime encore qu’un tiers des OM diabétiques sont réfractaires à ce traitement.
Le laboratoire de recherche s’est donc penché sur une chémokine, MCP-1, que l’on retrouve en abondance dans le vitré des patients atteints de RD et connue comme étant un médiateur inflammatoire pouvant stimuler la production de VEGF. Notre projet vise à reproduire in vitro des conditions similaires à celles retrouvées dans l’OM diabétique en soumettant des cellules dérivées de l’EPR à HOS.
Les différents travaux du LBPN au cours des dernières années ont montré une stimulation de la production de MCP-1 lorsqu’on soumet des cellules de l’EPR à HOS. De plus, sa stimulation serait indépendante de l’activation de protéines osmo-adaptatrices comme NFAT5 (données du laboratoire) que l’on retrouve impliquées dans de nombreux autres tissus humains.
Ainsi, l’inflammation jouerait un rôle prépondérant dans le développement et l’entretien de l’OM diabétique. A l’aide de différentes techniques de biologie moléculaire et d’inhibiteurs spécifiques de différentes protéines, nous tentons de reconstituer, protéine par protéine, la voie de signalisation impliquée dans la production de MCP-1.
La compréhension des mécanismes moléculaires impliqués dans la production de MCP-1 pourra, nous l’espérons, offrir de nouvelles perspectives innovantes de recherche concernant le traitement des OM diabétiques.

Le deuxième projet de recherche soutenu par la Fondation Brugmann concerne la sclérodermie systémique (SSc, systemic sclerosis).

La sclérodermie systémique est une maladie immunitaire rare qui se  se caractérise par un épaississement des tissus  notamment de la peau (même si tous les organes peuvent être touchés) ,phénomène que l’on appelle fibrose, et d’une atteinte des vaisseaux. Cette maladie peut être sévère, responsable de morbidité et de mortalité précoce selon l’importance de l’atteinte viscérale ou cutanée. La cause n’est pas encore connue même si l’on sait à ce jour qu’il existe des influences génétiques ou environnementales (exposition à certain toxiques par exemple).
Son diagnostic repose sur l’évidence de plaintes et de signes cliniques ainsi que sur la découverte d’auto-anticorps spécifiques dans la prise de sang et de la découverte d’anomalies cutanées, vasculaires, pulmonaires, rénales, ou digestives mesurables par certains scores (score de rodnan), tests ou examens (videocapillaroscopie). On sait aujourd’hui qu’il existe deux grandes classes de sclérodermie en fonction du type d’atteinte, de la présence de certains autoanticorps et de leur évolution ainsi que probablement de leur réponse aux différents traitements encore rares à ce jour.  On dispose en effet que de très peu de traitements pour cette maladie toujours incurable.
Un diagnostic le plus précoce possible avec l’identification de marqueurs de diagnostic ou de suivi est nécessaire afin de mieux diagnostiquer et mieux prendre en charge les patients.
On sait que différentes cellules sont importantes dans la physiopathologie de la maladie. Tout d’abord les cellules de l’immunité ( lymphocytes ou mastocytes) dérégulées qui produisent anormalement des autoanticorps  spécifiques, ou des molécules, activant d’autres cellules immunes ou non immunes.
Les cellules du tissu conjonctif de la peau ou des organes appelées fibroblastes subissent une activation importante responsable de la production excessive de tissu, une de ces molécules stimulantes est le TGFb, un des facteurs régulateurs central des processus de fibrose.
Ces cellules immunitaires et fibroblastiques interagissent avec des cellules des vaisseaux appelées endothéliales. On sait que les cellules endothéliales peuvent communiquer avec certaines cellules immunitaires comme les mastocytes présents dans les tissus cutanés lésés par l’intermédiaire d’un médiateur appelé SCF. Ce dernier va activer, différencier, stimuler la prolifération des cellules mastocytaires qui seraient responsables d’une production plus élevé du TGFb induisant par ce fait l’activation des fibroblastes.
Nous aimerions dans cette étude voir si les taux de SCF mesurés dans le sang des patients sclérodermiques sont plus élevés que dans celui des contrôles sains, et si cette élévation est le reflet d’une atteinte cutanée plus sévère en effectuant les dosages chez un groupe de patients souffrant de sclérodermie systémique diffuse en comparaison à un groupe de patients souffrant de sclérodermie systémique limitée (diagnostiqués selon les critères de classification). Un total de 45 patients ,âgés de plus de 18 ans, seront recrutés au sein du service de rhumatologie et de dermatologie de l’hôpital Brugmann, lors de consultations de routine. Les différentes éléments cliniques et biologiques seront récoltés à cette occasion.
Le but de cette étude est d’identifier un potentiel marqueur biologique pronostique de l’atteinte cutanée (SCF), nous permettant de distinguer de manière précoce une sclérodermie diffuse d’une sclérodermie limitée. Cela permettrait un suivi plus ciblé et rapproché de certaines atteintes organiques ainsi qu’une prise en charge d’emblée plus agressive notamment au niveau cutané.